Les revoilà partis pour un tour. Conseils d’école à gogo, gros Scotch et des gribouillages de plans de classe. Les enseignants ont une nouvelle équation à résoudre : comment faire rentrer 27 élèves dans une salle de 40 m2 avec un mètre de distance entre chaque enfant, tout en respectant les issues de secours ? Dimanche soir, le président de la République a annoncé le retour de la scolarité obligatoire, pour les écoliers et les collégiens, à compter du 22 juin jusqu’aux vacances d’été, à partir du 4 juillet au soir.
Au micro d’Europe 1, le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, insistait lundi matin sur «l’utilité pédagogique» d’un retour en classe de tous les élèves. Le sujet ne fait guère débat. Les enseignants, à commencer par ceux qui ont dans leur classe des enfants venant de milieux défavorisés, savent à quel point revenir à l’école, après plus de trois mois d’absence, est important. Les sociologues et chercheurs en éducation aussi. «Evidemment que ça compte, même pour quinze jours. Bien sûr, cela va dépendre de la façon dont les choses vont se passer. Mais de réaffirmer que l’école est obligatoire, c’est très important. Il fallait sortir au plus vite de cette école à la carte. Une carte très inégale», souligne Marie Duru-Bellat, spécialiste des inégalités dans le système scolaire.
A une semaine de cette reprise pour tous les élèves, il reste encore pas mal d’interrogations. Le ministre a simplement indiqué que le protocole sanitaire, jusqu’ici très strict, serait «allégé», notamment en matière de distanciation physique. Les nouvelles consignes seront précisées mardi. «J’espère que ce sera un vrai retour à la normale. Je n’ai qu’une peur : qu’on se retrouve à devoir bricoler une énième organisation bancale avec de nouvelles règles», confie Stéphane Crochet, du SE-Unsa (syndicat minoritaire).
Tout en saluant l’annonce d’Emmanuel Macron, Francette Popineau, la secrétaire du Snuipp (majoritaire dans le primaire) n’est pas plus rassurée : «C’est le même scénario qui se répète. Un président de la République qui fait une annonce, puis derrière un ministère de l’Education qui bredouille, et des professeurs de terrain qui doivent se débrouiller seul…» Un exemple : «Désormais, la règle sera d’espacer les élèves d’un mètre latéral [et non plus 4 m2 par élève, ndlr]. Souvent, on a des tables de deux. Ce qui veut dire un élève par table… Comment vous faites pour en rentrer 27 dans une classe ? Le ministère nous répond qu’il suffit d’en rajouter au fond de la classe. N’importe quel enseignant sait que du mobilier scolaire, on ne le trouve pas aussi facilement ! Qu’à chaque rentrée scolaire, on se bagarre pour avoir assez de chaises. De méconnaître à ce point la réalité, c’est du mépris», s’énerve-t-elle. Elle s’inquiète des premiers retours de terrain des collègues : «Beaucoup disent que, tant pis, ils prendront le risque de ne pas respecter la règle d’un mètre pour accueillir tous les enfants et ne pas se mettre les parents sur le dos.»
A mesure qu’il parle, Rodrigo Arenas, le président de la FCPE (principale organisation représentant les parents d’élèves) s’enflamme. «Cela fait plusieurs semaines qu’on milite pour que les enfants soient accueillis dans les écoles. Donc c’est une bonne nouvelle. Si elle se concrétise.» Il reste tout de même sur ses gardes : «On est tous épuisés de ces volte-face permanentes. Cette fois, on prend le Président au mot.» Il dit avoir mis au point «un kit juridique» pour permettre aux parents d’attaquer rapidement le ministère de l’Education au premier refus dans une école. Ambiance.
C’était en haut dans la liste des points à aborder, lors de la réunion lundi matin entre ministre et représentants syndicaux : comment accueillir tous les enfants en maternelle en respectant les gestes barrières ? «Le ministère nous a répondu que ce serait les mêmes règles qu’à la crèche : pas de distanciation physique en classe mais s’organiser pour que les groupes ne se croisent pas», rapporte Stéphane Crochet, avec prudence. «J’emploie le conditionnel, j’attends de lire le protocole sanitaire…»
De la même façon, les jeux extérieurs dans les cours de récré devraient faire leur réapparition. Interrogé sur ces points, le ministère de l’Education n’a pas répondu à Libération, indiquant qu’une communication serait faite en temps voulu.
Autre zone de brouillard : les lycées. Macron n’en a pas dit un mot, «comme s’ils avaient disparu de la surface de la Terre, alors qu’il y a beaucoup d’élèves décrocheurs notamment dans les filières professionnelles», regrette Rodrigo Arenas, de la FCPE. Depuis le 8 juin, les lycées en zone verte sont censés rouvrir notamment pour proposer des entretiens individuels aux élèves, mais rien d’obligatoire.
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